La notion de clientèle
Notion de clientèle
Initialement interdite, du fait du caractère intuitu personae de la relation médecin- patient, la cession de clientèle s’est peu à peu imposé, pour être finalement admise par un arrêt de la Cour de cassation en date du 07 novembre 2000. Désormais, le praticien disposant d’un droit patrimonial sur sa clientèle pourra céder son cabinet tout comme on peut céder un fonds de commerce, même si le propos doit être nuancé. Le droit de présentation à la clientèle permet au médecin de céder son cabinet en prenant en compte aussi bien les éléments corporels tels que le matériel médical et informatique, les murs de son cabinet mais aussi l’élément incorporel fondamental que représente la clientèle et qui donne tout son sens à la cession du fonds libéral.
A l’époque de la Rome antique, un client était habituellement un esclave libéré ou un membre de la classe plébéienne qui se mettaient sous la protection d’un patron bienfaiteur. Aujourd’hui il est considéré comme étant celui qui requiert un service moyennant rétribution.
En se référant à ces deux définitions données par le Petit Robert, nous pouvons retenir comme définition de la clientèle médicale la définition suivante : ensemble d’hommes et de femmes clients d’un praticien dans le cadre d’un contrat de soins encadré par une relation de confiance mutuelle.
La clientèle est donc un élément essentiel pour la vie d’un cabinet médical et est souvent représentée comme un élément attractif personnel dans la confiance que les clients placent envers leur praticien, c'est-à-dire aussi bien dans ses qualités morales et éthiques que dans ses qualités techniques.
C’est cette relation personnelle de confiance entre un médecin et son patient qui est l’objet de toutes les convoitises.
A force de débats doctrinaux et de jurisprudences, la clientèle est devenue un bien patrimonial et professionnel cessible qui trouve sa limite dans le principe du libre choix du patient pour son praticien.
La clientèle appartient donc à la communauté conjugale. Dès lors, en cas de divorce d’époux mariés sous la communauté, la valeur de la clientèle doit être évaluée pour être partagée entre les époux.
Ainsi, en cas de rachat d’un cabinet médical il est préférable de se prémunir en faisant sortir ce bien de la communauté conjugale par le biais d’un contrat de mariage.
Les avantages à reprendre la clientèle d'un confrère
Pour diminuer les risques liés à la création d'un cabinet, vous l’aurez bien compris un jeune médecin qui s’installe à tout intérêt à reprendre la clientèle d’un confrère.
Cette reprise doit être encadrée par une convention portant « cession du droit de présentation à la clientèle » et non comme on le voit souvent une « cession de clientèle ».
En effet, la jurisprudence admet la possibilité pour un praticien de présenter son successeur à sa clientèle, mais il ne peut pour autant la céder.
Même si dans les faits ces deux termes sont couramment utilisés, il est préférable d'utiliser la bonne terminologie.
Dans la limite du libre choix du patient pour son praticien, le jeune médecin bénéficiera d’une clientèle qu’il devra bien sûr « fidéliser » afin d’en limiter la perte.
Mais la clientèle n’étant qu’un élément incorporel du cabinet médical, la cession du droit présentation à la clientèle emportera probablement la cession d’élément corporel, tel que le matériel et le mobilier à prix d’occasion.
Les limites à la reprise d'une clientèle
Au-delà de l'avantage de prendre lieu et place d'un confrère, la reprise de la clientèle est plus onéreurse qu'une simple création de cabinet.
En plus du coût de la cession du droit de présentation à la clientèle propre dit, il faut prendre en considération les incidences fiscales d’une telle cession.
- droits d’enregistrement :
Comme toute cession, celle-ci doit être enregistrée à la recette des impôts dans un délai d’un mois à comptre de la signature.
- pour les cessions n’excédant pas 23 000 € : pas de droits d’enregistrement, seulement un droit fixe de 15 €
- pour les cessions superieures à 23 000 € : les droits sont de l’ordre de 5 % du montant de la cession.
- frais d’actes :
Bien que la cession du droit de présentation à la clientèle puisse être matérialisée par un acte sous seing-privé les parties peuvent préférer le concours d’un professionnel (avocat, notaire). Les frais d’acte sont généralement laissés à la charge de l’acquéreur qui peut les porter en déduction de ses recettes pour la détermination de son bénéfice imposable.
- intérêts d’emprunt :
Si l’acquisition du cabinet nécessite la souscription d’un prêt bancaire, les intérêts d’emprunt seront également déductibles.
- solidarité fiscale :
Cette solidarité est très souvent méconnue des professionnels de santés.
Selon l’article 1684 du CGI, l’acquéreur d’un cabinet médical peut être poursuivi en paiement de l’impôt sur le revenu dû par son confrère cédant et relatif à l’année de cession et, dans certains cas, à l’année précédente.
Toutefois l’acquéreur n’est responsable qu’à concurrence du prix de la cession et ne peut être mis en cause que pendant un délai de trois mois commençant à courir au plus tard deux mois après la date de la cessation effective de l’exercice professionnel par le médecin cédant.
Cette solidarité fiscale s’applique également en cas de convention d’intégration.
L’acquéreur peut demander à ce que le montant de la cession soit bloqué sur un compte d’attente pendant un délai de cinq mois.
- sort de la taxe professionnelle pour le cédant :
La Taxe Professionnelle est due pour l’année entière par le médecin qui exerce son activité au 1er janvier. (Article 1478 du CGI)
Lorsque la cession du cabinet intervient en cours d’année, le changement d’exploitant n’entraîne pas transfert de la charge de l’impôt, le cédant reste redevable de la taxe pour l’année entière, aucune imposition ne sera établie par l’administration fiscale au nom du successeur.
Cependant, il n’est pas rare en cas de cession du cabinet que les parties prévoient que le successeur supportera une partie de la taxe professionnelle de son prédécesseur.
La volonté des parties ne se présumant pas, la prise en charge par le successeur de la taxe professionnelle doit faire l’objet d’un écrit. Généralement, cette prise en charge est directement prévue dans l’acte de cession du cabinet.
Cette convention entre les parties ne produit d’effet qu’entre elles, le cédant demeurant le seul redevable de la taxe professionnelle vis-à-vis de l’administration fiscale.
Ainsi, si le successeur ne paie pas l’impôt tel que prévu dans l’acte de cession, le cédant sera tenu de l’acquitter, quitte à se retourner par la suite contre son successeur devant le juge civil pour faire respecter la convention.
Si le changement d’exploitant prend effet au 1er janvier, la situation est différente. Le successeur sera imposé à la taxe professionnelle sur les bases (recettes) de son prédécesseur déclarées avant le 1er mai de l’année précédant celle de la cession du cabinet.
Magali LEVACHER - 05/06/2007 - Mis à jour le 17/01/2008